Les maudits Français
Ils parlent avec des mots précisIls prononcent toutes leurs syllabesÀ tout bout de champ, ils se donnent des bisesIls passent leurs grandes journées à table
Ils ont des menus qu'on comprend pasIls boivent du vin comme si c'était de l'eauIls mangent du pain puis du foie grasEn trouvant le moyen de pas être gros
Ils font des manifs aux quart d'heureÀ tous les maudits coins de rueTous les taxis ont des chauffeursQui roulent en fous, qui collent au cul
Et quand ils parlent de venir chez nousC'est pour l'hiver ou les IndiensLes longues promenades en Ski-dooOu encore en traîneau à chiens
Ils ont des tasses minusculesEt des immenses cendriersIls font du vrai café d'adulteIls avalent ça en deux gorgées
On trouve leurs gros bergers allemandsEt leurs petits caniches chérisSur les planchers des restaurantsDes épiceries, des pharmacies
Ils disent qu'y dînent quand ils soupentEt il est deux heures quand ils déjeunentAu petit matin, ça sent le yaourtIls connaissent pas les œufs-bacon
En fin de soirée, c'est plus choucrouteMagret de canard ou escargotsTout se déroule bien jusqu'à ce qu'on goûteÀ leur putain de tête de veau
Un bout de paupière, un bout de genciveUn bout d'oreille, un bout de museauPour des papilles gustatives de Québécois, c'est un peu trop
Puis, ils nous prennent pour un martienQuand on commande un verre de laitOu quand on demande : « La salle de bainEst à quelle place, s’il vous plaît? »
Et quand ils arrivent chez nousIls se prennent une tuque et un KanukSe mettent à chercher des iglousFinissent dans une cabane à sucre
Ils tombent en amour sur le coupAvec nos forêts et nos lacsEt ils se mettent à parler comme nousApprennent à dire tabarnacle
Et bien saoulés au caribouÀ la Molson et au gros ginIls s'extasient sur nos ragoûtsDe pattes de cochon et nos plats de binnes
Vu qu'on n'a pas de fromages qui puentIls s'accommodent d'un vieux cheddarEt ils se plaignent pas trop non plusDe notre petit café bâtard
Quand leur séjour tire à sa finIls ont compris qu'ils ont plus le droitDe nous appeler les CanadiensAlors que l'on est québécois
Ils disent au revoir, les yeux tout trempesLe sirop d'érable plein les bagagesOn réalise qu'on leur ressembleOn leur souhaite bon voyage
On est rendus qu'on donne des becsComme si on l'avait toujours faitY a comme un trou dans le QuébecQuand partent les maudits Français