Un monsieur me suit dans la rue
J'étais une petite fille,Du moins je le croyais,Portais des espadrilles,J'avais encor mes jouets,Mais un jour dans la rue,En sortant de l'école,Je vois un inconnuQui, à mes pas, se colle.
Un monsieur me suit dans la rue.J'en avais rêvé bien souventEt fus d'avance tout émue.Qu'est-ce qui va se passer maintenant ?Quand on m'a suivie dans la rue,J'pensais que ça serait épatant.Quand on m'a suivie dans la rue,Ce n'était qu'un vieux dégoûtant.
Le cœur a ses mystères :Je suis prise de passionPour un homme, un gangsterQu'a de la conversationEt quand je vais chez lui,Il faut faire attention.Je sais qu'on le poursuitPour le mettre en prison.
Voilà qu'on me suit dans la rue,Gros soulier qui marche en criant.Pourvu qu'on n'm'ait pas reconnue.J'ai peur que ce soit des agents.J'enfile des rues et des rues.Mon Dieu, ça devient effrayant.On me suit toujours dans la rue.Ils approchent leurs mains en riant.
Je suis tombée maladeDans un grand lit tout blanc,Le cœur en marmelade,Mon pauvre front brûlant.Un prêtre me demande :« Voulez-vous le Bon Dieu ? »Moi je préfère attendre,Des fois que j'irais mieux.
Voilà qu'on me suit dans la rue.Les hommes saluent, déférents.C'est pour moi, je l'aurais jamais cru,Que les femmes se signent en passant.Comme je passe à travers les rues,J'arrête la vie et le mouvement.Tout le monde me suit dans la rue,Tout en noir, à mon enterrement.