Les Grognards
Écoute, peuple de Paris :Tu n'as pas la fièvre.Écoute ces pas qui marchent dans la nuit,Qui s'approchent de ton rêve.Tu vois des ombres qui forment une fresque gigantesque accrochée dans ton ciel.Écoute, peuple de Paris :Regarde, peuple de Paris, ces ombres éternellesQui défilent en chantant sous ton ciel.
Nous les grognards, les grenadiers,Sans grenades, sans fusils ni souliers,Sans ennemis et sans armée,On s'ennuie dans la nuit du passé.Nous les grognards, les grenadiers,Sans grenades, sans fusils, ni souliers,Ce soir nous allons défilerAu milieu de vos Champs-Élysées.Wagram, Iéna, Eylau, Arcole, Marengo... Ça sonne bien.Quelles jolies batailles.Tout ce travail,C'était pas pour rienPuisque les noms de rues,Les noms d'avenuesOù vous marchez,C'est avec le sangDe nos vingt ansQu'on les a gravés.Nous les grognards, les grenadiers,Sans grenades, sans fusils ni souliers,Sans ennemis et sans armée,On s'ennuie dans la nuit du passé.Nous les grognards, les grenadiers,On est morts sur des champs étrangers.On a visité la RussieMais jamais nous n'avons vu Paris.On n'a pas eu le tempsD'avoir un printempsQui nous sourit.Nos pauvres amoursDuraient un jour,Au revoir et merci.Roulez, roulez tambours.Dans le petit jourOn s'en allait.Au son du claironEt du canon,Notre vie dansait.Nous les grognards, les grenadiers,On nous a oubliés, oubliés...Depuis le temps de nos combats,Il y a eu tant et tant de soldatsMais, cette nuit, vous nous verrezSans grenades, sans fusils ni souliers,Défiler au pas cadencéAu milieu de vos Champs-ÉlyséesSans grenades...Sans fusils...Ni souliers...À Paris...