J'appuie sur la gâchette
Seul dans la pénombre, avec mon passé, cherchant à me remémorer, les joies et les raisons pour lesquelles j'encaisse la monotonie de cette vie.
Plus désarmé qu'au premier jour, les années blanches de ma jeunesse se sont laissées posséder.Quant au futur, hein, le futur j'ose même pas y penser.Vide est ma vie, et pourtant non, je n'ai pas choisi. Tant le présent n'est que néant.
Tout a commencé sûrement le jour où je suis né, le jour où je n'ai pas croisé la bonne fée qui aurait fait de moi ce que je ne suis pas. Ce qu'il m'arrive d'envier parfois ceux que la vie a dotés d'une chance.Mais moi, malheureusement voilà je n'en suis pas là.Et privé de çà pour qui devrais-je mener un combat ?De toute façon pas la peine je connais la rengaine mais je n'en ai pas la force.
Mon amour pour la vie s'est soldé par un divorce.Moi aussi j'ai rêvé de connaître l'idéal idylle, le désir, la passion pour ne pas perdre le fil. Quitter sur le champ la ville, s'isoler sur île au lieu de çà ma vie file, se faufile et défile sans domicile fixe.J'ai toujours relevé la tête même à genoux mais ce soir je suis fatigué de lutter et pense sérieusement à tout déconnecter.
L'hiver a posé son manteau, comme si la mort était déjà là, tout près de moi.Le froid me lacère la peau, comme cette vie dont je n'ai plus envie.Égaré dans ces pensées et tout ne cesse de m'apitoyer.Voilà ce soir, je vais craquer, ne pouvant échapper à mon destin.
L'âme stressée, le cerveau compressé comme usé par la guerre des nerfs à laquelle je dois me livrer. Subir, sans pitié, sans répit : voilà ma vie.Gris semble l'avenir et noire est la couleur de mon esprit.Je n'essaye plus de comprendre, ni de me faire entendre, je suis le troupeau avec un numéro collé dans le dos. Métro, boulot, aseptisé du cerveau, mon ultime évasion se trouve dans le flot de ces mots.Quarante ans de déboire passés à la lumière du désespoir, tu peux me croire ça laisse des traces dans le miroir.
J'ai les neurones affectés, le cur infecté, fatigué de lutter, de devoir supporter la fatalité et le poids d'une vie de raté.Voilà pourquoi je m'isole, pourquoi je reste seul, seul dans ma tête, libre, libre d'être un esclave en fait battant en retraite, fuyant ce monde d'esthètes en me pétant la tête.Ok j'arrête net, j'appuie sur la gâchette.